P'tite culotte et porte-jaretelles
L’année dernière, j’me suis retrouvée sans mec, j'ai été quittée quoi! J’me suis toute de suite inscrite sur un site de rencontres Internet. Etre seule, c’est pas mon truc ! Des contacts, j’en ai eu plusieurs. Un type que j’ai eu au téléphone a provoqué un cataclysme : il voulait savoir si je portais de la lingerie fine… J’suis restée comme plongée dans un abîme de perplexité. Et voilà ! J’m’en doutais ! Je négligeais l’essentiel ! Porter des culottes en coton blanc, picot taille et jambes de chez Damart! C’est nul ! Comment n'y ai-je pas pensé plus tôt ?…Priorité au confort, d’accord, mais enfin, évolue vieille branche! Faut vivre avec son temps. Je m’suis dit : "Ma p’tite continue comme ça et t’es larguée jusqu’au restant d’tes jours !… " Jouer à la jeunette, draguer à tour de bras, sans froufrous et sans plus d’artifices que tes beaux yeux ! Erreur, grave erreur, erreur fatale. J’me suis penchée sérieusement sur la question. J’ai assisté à pas mal de défilés : parures, combinés, porte-jarretelles, soutien-gorges, strings, bodies, boxers, bustiers, Y a de tout et sur des corps superbes, vous pensez ! Sur les sites, on ne compte plus les promotions de lingeries, avec photos. A Paris, les vitrines, vous voyez bien plus de déshabillés que de fringues. Mais alors, ce que ça coûte ! Pour quelques centimètres carré de tissu à se mettre sur le derrière, y a de quoi se ruiner ! Encore faut-il être sûre que ça agisse. Un homme m’a donné son avis là-dessus : " oui , une jolie parure, c’est un plus…ça peut être excitant, il faut voir comment c’est porté ".
D’accord ! Il faut voir comment c’est porté, ma bonne dame ! Tiens bien sûr! Que rien ne déborde surtout ! A bannir cellulite, bourrelets, poils indésirables, rides… Tout doit disparaître. Un sein flasque, et c’est fichu ! Alors, gym tous les matins, rameur pour retrouver une silhouette de rêve : c’est la pub qui l’dit. Mieux, le stepper, le tapis de marche pour muscler les cuisses, mollets et fessiers et aussi les abdos. ! Quel programme ! Il y a des femmes qui vous disent : " La belle lingerie, je la porte pour me faire plaisir, c’est pour moi, pour me sentir bien ! " Moi je dis non ! Pour ma pomme, la culotte coton, ça m’va parfaitement. Si j’investis c’est pour qu'ils bandent, tiens la bonne blague ! Parce que vous croyez que ça coule de source ? J’vais pas vous faire un dessin. J’ai commencé une petite collection, tout en noir, c’est ce que je préfère, pour les assortiments, c’est plus facile. La p’tite culotte shorty, taille basse, en spandex ; craquante ! bas noirs auto-fixants, finition jarretière en dentelle, le top ! Ils tiennent sans porte-jarretelles ; ce machin-là je n’aime pas trop.
Quand je pense que Marlène Dietrich rendait les hommes fous, avec quoi, j’me l’demande ! …C’est Joseph Von Sternberg qui l’a lancée. Il a marqué un grand coup avec "L’Ange bleu ". dans la fameuse scène, quand elle est assise sur un tonneau, avec sa jambe en l’air et son chapeau haute-forme… Fringuée faut voir comme. On voit même pas c’qu’elle a sur elle comme robe, ce n’est pas l’intéressant. Non ! l’objectif braqué sur l’entre-jambe, qu’on devine au milieu d’un flou de dentelles, bas sombres, escarpins à talon, porte-jarretelles naturellement, laissant voir un haut de cuisse bien potelée, juste ce qu’il faut. Et elle passe pour avoir de la classe ! C’est vrai que dans sa jeunesse, elle lisait Goethe. Tout le monde ne peut pas en dire autant. Moi, mon auteur préféré en ce moment, c’est Pierre Desproges, si vous voulez l’savoir. Génial !
Après, on lui a fait une autre tranche, à Marlene. C’est dans " la femme et le pantin " , qu’elle fait distinguée avec ses pommettes saillantes. La preuve est qu’avec une femme quelconque on peut en faire une canon, rien qu’en changeant l’angle de pose et la lumière… Dans les années trente, une paire de belles gambettes faisait de vous une star.
Mais, voilà j’ai pas eu cette chance de rencontrer un von Sternberg…Pour dire qu’une carrière ne tient pas à grand-chose, pas vrai ?
Desproges, parlons-en. voilà un mec, un vrai ! Lui, au moins, il craque pour les femmes. Rien que de passer devant une cabine d’essayage dans un grand magasin, et d’apercevoir une cuisse ou une fesse par la fente du rideau, il gémit d’une envie folle de mordre, d’étreindre, de pétrir. Je n’invente rien, c’est lui qui raconte. Des hommes comme ça, j’en ai pas rencontrés, alors j’arrête avec la lingerie fine. Dans les films, ça marche mais dans le réel, ça fait aucune différence ! Vous pouvez me croire !