Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
histoires d'hier et d'aujourd'hui
24 septembre 2012

Un été pluvieux

ETRETAT  Passer plusieurs semaines seule dans un camping désert  alors qu’une pluie battante s’acharne sur le Mobil Home,  ne se compare pas avec  six mois «  Dans  la forêt de Sibérie » (1), sauf que j'ai un point commun avec Sylvain Tesson : nous ne pouvons nous passer d’un chien de compagnie, sauf que Sylvain Tesson  abandonne le sien avant de rentrer à Paris. ce que je ne ferais à aucun prix.

 Cette année 2012, je suis donc livrée à moi-même dans le village des Tilleuils proche d'Etretat. Vacances studieuses :  journaux, certains ouvrages à redécouvrir :  « Le désarroi de l’élève « Törles (2) -  (j'ai renoncé à lire  « L’homme sans qualité » que j’avais entamé l’année d’avant), relu aussi un Nabokov « Exploit », (son « ADA » dépasse mes capacités d’attention), les "contes fantastiques" d’Edgard Poe, les romans de Maupassant :    « Bel ami », « Pierre et Jean », ses chroniques méditerranéennes....

 J'ignorais combien  la Normandie était familière à Maupassant. Et pourtant, il est partout dans la région. Particulièrement attaché à Etretat, il en fait d’admirables descriptions, avec un enthousiasme d’amoureux, et une précision de peintre. » Ce petit nom d'Étretat, nerveux et sautillant, sonore et gai, ne semble-t-il pas né de ce bruit de galets roulés par les vagues » sous forme de chroniques dans Le Gaulois , dans Gill, insérées  dans ses romans  (« Une vie », « Bel-Ami »),   dans sa correspondance, et dans ses contes.   « J’adore positivement ces Falaises d’Etretat….Mes meilleurs jours sont ceux que j’ai passé, étendu sur une pente d’herbes, en plein ciel, à cent mètres au-dessus des vagues » et encore « Je vis sur les falaises, j’adore positivement ces falaises d’Étretat… ». Les lieux qu’il aimait  et qu’il se plaisait  à  mentionner dans tous ses écrits,  je les ai fréquentés lors de mes virées pédestres ou à bicyclette. Pendant de nombreuses années, alors que j’étais parfaitement valide, j’allais d’un village à l’autre. Fécamp , Yport caché au fond de la vallée, Bénouvillee perché sur la falaise,    Antifer et sa vaste plage, Saint-Jouin, Goderville où on ne vient que pour son marché du mercredi et son  magasin de grande distribution . L’unique restaurant de la ville vient de fermer…

 A cause de l’usage qu’en fait la télévision, les programmes scolaires, les spectacles de  patronage, j’avais une piètre opinion de l’œuvre et de l’écrivain. Je n’avais lu  à peine le dixième de ses publications et rien du Maupassant infatigable voyageur, admiratif de la Sicile, où j'avais fait un séjour avec mon petit-fils alors adolescent. Curieux  des pays d’Afrique du Nord, poussant ses expéditions jusque dans les contrées les plus isolées. Les détails de ses itinéraires, ses impressions, ses rencontres étaient régulièrement envoyés aux journaux qui lui ouvraient leurs colonnes.

 Cet homme aimant la vie sous toutes ses  formes, curieux de tout, passionné d’écriture, soucieux de son apparence et de son environnement, était miné par le mal être, la peur de la solitude, la fascination pour le fantastique, le macabre. Très malade depuis sa jeunesse, immergé dans une fin de siècle bouleversé qui connaît ce qu’il y a de pire. Il vit  le désenchantement dès la trentaine, le dégoût de lui-même et de ses semblables, pour autant il a le goût de l'argent et aspire à la notoriété.

 Dans une nouvelle datant de janvier 1883 « Comme un mort », il  imagine une rencontre entre le narrateur et un personnage, un allemand, lecteur fervent de Schopenhauer, ce qui lui donne l’occasion de révéler combien les thèses du philosophe ont influencé son œuvre. Selon ses biographes ses lectures ne font qu’intellectualiser une profonde souffrance due à une enfance tourmentée, un père absent, une mère névrosée…

 Enclin à la solitude et dédaignant les fréquentations de Salon, il a pourtant été l’intime de grands romanciers de l’époque.   « Le plus étrange, c’est que cet âme désespérées qu’entraîne le vertige de la mort habite un corps d’un bon vivant, toujours en quête de nouveaux plaisirs  et de tours pendables ». Paul Morand (3), dans sa biographie, raconte une de ses dernières farces. Le 17 août 1889, alors que la maladie atteint une phase fatale (3), il fait venir à la Guillette (5) une foule d’invités pour une fête avec musique et danse. Tout Etretat s’est massé derrière la haie our assister au spectacle. Le clou de la soirée est une mise en scène reproduisant « Le crime de Montmartre ».  Le réalisme est insoutenable, manière d’assouvir sa mégalomanie, son goût de la provocation et du macabre.

-------------------------------------------------------------------------------------------------------

Maupassant

  1)  Sylvain Tesson

2 )  Robert Musil

(3)   Editions France Loisirs  - page 151

  (4)   Maupassant meurt le 6 juillet 1893

 (5) La maison qu’il a fait construire à Etretat

Publicité
Publicité
Commentaires
histoires d'hier et d'aujourd'hui
  • Textes lus, choses vues, évènements vécus. Courtes fictions. Poésies table des Titres n°1 - 30 mai 2011. table des Titres N°2 au 19/2/2013 table des titres n°3 - 27 février 2014 table des titres n°4 - 21 janvier 2015
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité