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histoires d'hier et d'aujourd'hui
25 mai 2010

Eugène Delacroix

Lutte_de_Jacob_avec_l_Ange

 

Jeudi

 

Ce matin, je reçois le courrier Alef.  ! Dans l’enveloppe :  primo, une lettre qui rappelle le prix de l’atelier. J’évite d’y penser, mais ils ne me laissent pas l’oublier :  « Madame, Monsieur, vous avez versé des arrhes, gna, gna, gna… merci de bien vouloir régler le solde, avec le prochain envoi ». Secondo,  la proposition :  « journal intime et donner à voir » ça n’va pas ensemble. Dans mon journal intime, je suis et auteur et lecteur. C’est du vrai et pas du faire semblant. Personne ne le lit. Ah si ! William, en 1958,  y avait mis son nez, sinon personne. Bof ! ! Soyons honnête, on ne peut pas écrire un journal soit-disant intime quand on sait que plein de gens vont le lire. La consigne : être bref. Ma première idée était de me servir des nombreux cahiers que j’ai tenus entre le 15 janvier 1956 et le 30 septembre 1975. Ce que j’écrivais à l’époque c’était trop bien ! Si j’avais osé ! Pas de casse-tête, du tout cuit, y’avait qu’à copier. Etre bref c’est pas mon style. Moi, c’est le journal-fleuve. Jacques Lacarrière, quel maniéré !  « La liturgie du givre à l’aurore du froid », c’est pour qui toutes ces fioritures? C’est seulement pour sa pomme peut-être ? ça, un journal intime, à d’autres !.

 

 

Vendredi

 

 

9 février 1943 – André Gide compte les marches d’escaliers. Les chiffres,  il adore ça, en plus, ça l’aide à faire ses exercices d’assouplissement… Il a 82 ans. Il est gaga. Les exercices d’assouplissement ça m’fait penser au nazi qui faisait faire des pompes à un pauv mec, avec une pointe de baillonnette chargée pointée sous lui . Le nazi, lui aussi aimait les chiffres : « un, deux, trois, cinq, dix, quinze…. », jusqu'à ce que le mec se flingue tout seul, comme c’est drôle ! A se péter de rire. C’est dans le film : »la boite à musique » tout le monde peut le voir.. En 43 (comme avant et après d’ailleurs) on arrête, on torture, on déporte vers les camps d’extermination. Et pourtant « …Toute sa vie il fut préoccupé  par le rôle et la responsabilité de l’écrivain » C’est l’Encyclopédie Universalis qui l’dit. En attendant, il compte les marches d’escaliers. Au fait ! moi, à quoi  j’pensais en 1967, pendant que la guerre de six jours faisait rage en Israël ? Consultons les cahiers intimes : Ah oui ! voyons ce qui est écrit : Le 22 juillet  1967 (à l’époque pas d’ordinateur, ce qui est écrit est écrit, pas de triche) :  « Je pense beaucoup à tromper G…. en ce moment ! Tous les soirs je rêve que j’aime un homme d’une tendresse infinie…Je voudrais le tromper avec un homme jeune, aux traits délicats, sensible, un homme pour qui je représente quelque chose et qui me respecte. J’aimerais avoir avec lui des conversations, de longues conversations, m’asseoir devant la mer et regarder les vagues sans rien dire…. « . Voilà du journal intime, au moins ! Je me donnais l’droit de rêver. Ironie du sort, mon mec d’aujourd’hui a horreur de regarder la mer.

 

Samedi

 

Liliane, une phrase au hasard : « Tout le monde part en vacance au mois d’août, moi seule pars en flèche lorsque j’entends la sonnerie du téléphone ». C’est le « Je joue, donc j’existe ». de Marc-Alain Ouaknin. C’est le jeu du mouvement, la danse des mots. Application réussie d’une certaine kabale : « l’homme se fait de se défaire ». On défait du sens pour faire du sens. C’est ce dont je ne suis pas capable, trop assujettie au sens. La lecture du texte de Liliane m’a laissée toute bête, comme impotente. Se libérer des mots dans leur conception usuelle de façon à créer des nouvelles formes : rire aux éclats, c’est s’exploser comme « écrire aux éclats ».

 

Dimanche

 

Pas vraiment une bonne idée d’avoir à s’observer au fil des heures. ¨Pour moi qui vis plutôt beaucoup dans le mental, ça accélère le film. Normal, je suis Gémeaux donc mercurienne!  Alors pendant que je taille la haie de mon jardin, ça gamberge. Au bout de tant d'années, l'aptitude à m’extasier sur la beauté des arbres s’est usée. C’est dans « chemin faisant » qu’on peut les trouver les instants lumineux de Jacques Lacarrière. Je vais acheter le livre pour voir ça. Moi aussi, "chemin faisant" j’en ai trouvé des moments mémorables au cours de mes pérégrinations, pas vraiment lumineux, plutôt à risques. On trouve quand on erre, sans guide et sans but. Qu’est-ce qu’on trouve ? Des épreuves surtout. Je ne me la joue pas à l’illuminée, moi !

 

Lundi

 

Hier Je m’suis fringuée en parfaite bourgeoise du Seizième. Robe Rodier en jersey, rayée brun et rouge , col cheminée qui dégueule autour du cou, toute droite,  retenue par une ceinture à la taille pour avoir la bonne longueur, manteau genre loden beige à col tailleur, un bouton intérieur et quatre extérieurs. Collants tirés sur la jambe sans un pli, couleur noisette, assortie aux chaussures Méphisto, grand confort. En route pour l’Eglise Saint-Sulpice, rendez-vous avec Delacroix. Arrivée pile à l'heure, je me suis assise en face dufameux tableau. Le guide s'avance dansma direction. « Marie Furcajg ? »-  « Elle-même ». Et voilà ! il me connaît déjà sans m’avoir jamais vue. Il me présente au reste de l’assemblée avec un peu d’emphase ; un groupe de dames très respectables qui s’en foutent complètement de qui je suis et de comment je 'appelle. Le tableau, grandiose, l’Eglise St-Sulpice imposante, la place très élégante. La foule déambule dans le quartier : des familles entières, des couples, des bandes. Tous, sont contents d’être là, ils se croient dans le nombril du monde; ça me laisse froide et décalée.

 

mardi

 

Je passe un couriel à Annick au sujet du « Combat de Jacob avec l’Ange ».  elle m’a manqué, dimanche alors que je tourniquais autour de la place St. Sulpice ayant perdu le sens de l’orientation. Après tout, c’est elle qui m’a fait connaître le tableau, l’autre jour, à l’occasion d’une virée à « La Procure » pour acheter nos grammaires hébreux. Epatante, cette fille,  qui réussit tout ce qu’elle entreprend.  Après s'être battu avec l'Ange, Jacob va revoir son frère avec qui il s'était fâché. La grande question est de savoir si Esaü, lorsqu’il courut à la rencontre de Jacob, l’a embrassé ou mordu, les deux mots étant orthographiés identiques, à une lettre près (1) Le débat est ouvert.

 

Mercredi

 

De mon bureau, j’ai vue sur un grand arbre derrière la maison. Il n’y a pas de rideaux aux fenêtres. Equipé d’un baudrier, une corde et d’une scie électrique, un type monté jusqu’au sommet coupe les branches encore feuillues et transforme l’arbre en squelette. Le téléphone sonne,  c’est Luc. Nous bavardons. « Je te laisse car figure-toi :  je suis nue ; si le type dans l’arbre se tourne de ce côté, il va tomber à la renverse, ou lors il va appeler la police sur son portable et me faire condamner pour exhibitionnisme ». Luc rit.

 

 

 

1) Genèse – paragraphe : 33 – verset 4

embrasser = nun-shin-koph

mordre = nun-shin-kaph

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